Un point sur l’Année de la Bande Dessinée 2020

 

Benoit Peeters, président des États Généraux de la Bande Dessinée et vice-président de la Ligue des auteurs professionnels, était sur France Culture pour parler de l’Année de la Bande Dessinée 2020 et de la situation des auteurs.

 

 

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4e rencontres internationales de la bande dessinée

 

La Cité internationale de la bande dessinée et de l’image organise la quatrième édition des Rencontres internationales de la bande dessinée, réunissant différents acteurs du secteur invités à débattre des problématiques professionnelles en cours. Sous le titre Bande dessinée : un patrimoine vivant : Histoire des arts, patrimonialisation et transmission, l’édition 2020 est consacrée au patrimoine de bandes dessinées. Nombre de places limitées : inscrivez-vous !

jeudi 2 et vendredi 3 avril 2020

Bande dessinée : un patrimoine vivant : Histoire des arts, patrimonialisation et transmission

en partenariat avec le Ministère de la Culture, les États Généraux de la Bande Dessinée, le réseau Canopé16, la communauté d’agglomération GrandAngoulême, la ville d’Angoulême, le Pôle Image Magelis et la Région Nouvelle-Aquitaine.

En cette année 2020 de la Bande dessinée, les Rencontres internationales de la bande dessinée, qui succèdent aux trois éditions des Rencontres Nationales de la Bande Dessinée lancées en 2016, se penchent sur l’une des questions les plus essentielles de l’histoire culturelle : celle du patrimoine. Le rapport La Bande dessinée, nouvelle frontière artistique et culturelle – 54 propositions pour une politique nationale renouvelée remis par Pierre Lungheretti avec la collaboration de Laurence Cassegrain au Ministre de la Culture en janvier 2019 proposait la mise en œuvre d’une politique nationale du patrimoine de la bande dessinée. Le préalable à l’établissement de cette politique nationale du patrimoine de la bande dessinée est la définition de ce patrimoine et des enjeux qui lui sont liés, en tant que biens très largement partagés et qui influent sur la constitution d’une identité culturelle collective.
Cette notion de patrimoine soulève la question du statut même de la bande dessinée au sein de l’histoire des arts. Patrimoine vivant, en permanente évolution créative et technique, de quelle manière la bande dessinée entre-t-elle dans les collections des musées et des bibliothèques ? Et comment rendre accessible ce patrimoine in vivo pour en assurer une meilleure transmission et une plus large diffusion ? Quels rapports les créateurs entretiennent-ils avec la patrimonialisation de leur travail et quels équilibres convient-il d’observer entre collections publiques et privées, archives d’éditeurs et dons d’auteurs, politique d’acquisition et marché de l’art ? Par quels moyens et selon quels axes étudier ce patrimoine transdisciplinaire et protéiforme, pour en développer une meilleure connaissance, mieux le conserver et surtout, davantage le transmettre ?

Ce colloque interdisciplinaire et international a pour objectif de rapprocher et confronter les points de vue et les approches, en incluant également la question de l’innovation et des humanités numériques. Pendant ces deux journées de rencontres, seront abordées non seulement les méthodes, pratiques et outils, mais aussi de nouvelles approches théoriques et analytiques qui permettront de renouveler entièrement la perception et le traitement du patrimoine de la bande dessinée.

En ce sens, on pourra s’interroger sur la nature spécifique de la bande dessinée, et ce que celle-ci permet de repenser au profit d’un renouvellement de la notion générale de patrimoine au XXIe siècle. Quel peut être l’intérêt de la bande dessinée par rapport aux approches patrimoniales traditionnelles du point de vue muséographique, ethnologique, littéraire, linguistique ? De quelle manière la bande dessinée peut-elle contribuer à un développement plus démocratique du patrimoine culturel matériel et immatériel, et comment cet apport peut-il s’organiser à une échelle internationale ? Avec quels enjeux ?

Jeudi 2 avril

  • 9h00-9h30 Allocution d’accueil par Pierre Lungheretti, directeur général de la Cité
  • 9h30-10h15 Patrimoine et bande dessinée : Introduction par Marie-José Mondzain
  • 10h30-12h00 Etudier le patrimoine de la bande dessinée : les enjeux de la recherche sur un corpus culturel : Table ronde avec Marc Monjou (Eesi), Pascal Robert (ENSSIB), Frédéric Chauvaud (Université de Poitiers), Adrien Genoudet (Entre-temps / Collège de France)
  • 12h00-13h00 Construire un patrimoine de la bande dessinée : résistances et innovations : Table ronde avec Jean-Marie Compte (BnF), Service du livre et de la lecture, Direction des musées de France (Ministère de la Culture), Anne-Héléne Hoog (CiteBD), et autres intervenants non encore confirmés.
  • 14h00-14h30 Vers un meilleur usage du numérique – Présentation de la base de données MediaBD par Jean-Paul Gabilliet (chef de projet Mediabd)
  • 14h30-15h00 Bande dessinée et histoire de l’art : quelle place pour la bande dessinée par Eric de Chassey (INHA)
  • 15h00-16h30 Comment collectionner la bande dessinée ? Critères de distinction, généalogies et transmission : Table ronde avec Annette Gehrig (Cartoon Museum Basel), Carine Picaud (Bibliothèque nationale de France) et autres intervenants non encore confirmés
  • 17h00-18h30 Transmettre : quels usages du patrimoine de la bande dessinée ?
    table ronde avec Sébastien Gokalp (Musée national de l’histoire de l’immigration), Stephane Baujean (FIBD), Zeev Gourarier (Musée des arts forains), Yannis Koikas (BNF), Emilie Salaberry (Musée des Beaux-arts d’Angoulême).
  • 18h30-19h00 Conclusion de la première journée
  • 19h00  Cocktail et soirée

Vendredi 3 avril

  • 9h00-10h30 Les auteurs face à l’Histoire – faire vivre le patrimoine par la création contemporaine : Table ronde avec Antoine Ozanam, Ferri, Samuel Lévêque (Citebd)
  • 10H45-12H30 Editeurs et auteurs : le patrimoine en construction : table ronde avec T. Groensteen (Actes Sud/ L’an 2), F. Boilet, Julien Papelier (Dupuis), et autres intervenants non encore confirmés
  • 14h00-14h30 Jean-Pierre Dionnet : mes moires de la bande dessinée
  • 14h30-16h00 Collectionner : l’art et la passion
  • 16h00-17h00 Conclusion : la bande dessinée fait-elle patrimoine ? par Aurélien Bellanger et Jean-Pierre Dionnet

La participation à ces journées d’étude est gratuite sur inscription (recommandée en raison du nombre de places limité).

pour s’inscrire :

Retraite des auteurs : agir !


Avec la réforme des retraites, les artistes-auteurs pourraient bien perdre encore près de 13% de leurs revenus, voire 17% pour les auteurs et autrices du livre.

La Ligue des auteurs professionnels a proposé aux autres organisations professionnelles concernées d’aller au-delà des discussions en cours avec les pouvoirs publics et de lancer une grande campagne pour éviter la catastrophe aux artistes-auteurs.

Dès aujourd’hui, les États Généraux de la Bande Dessinée, aux côtés des autres organisations, vous demandent d’écrire à vos députés et sénateurs pour les mettre au courant du danger et obtenir leur soutien. La démarche est simplifiée au maximum, tout est regroupé sur un site au nom explicite : extinction-culturelle.fr. Vous y trouverez un modèle de courrier et les liens pour récupérer rapidement l’adresse de vos parlementaires. Et, bien sûr, des explications complètes sur ce qui menace les créateurs avec la réforme des retraites.

Partagez cette adresse sur les réseaux sociaux, accompagnez-la de témoignages, de dessins, de photos… Utilisez les hashtags #payetaculture et #payetonauteur. Auteurs, autrices, artistes, lecteurs, lectrices, citoyens et citoyennes, nous comptons sur vous pour protéger la création en France.

Rapport Lungheretti sur la BD et discours du Ministre de la Culture : de grands enjeux pour les auteurs

Communiqué commun du SNAC BD et des États Généraux de la Bande Dessinée

Durant le festival d’Angoulême 2019, un très ambitieux rapport a été remis au Ministre de la Culture. À la suite des mobilisations du syndicat des auteurs SNAC-BD et des travaux des États Généraux de la Bande Dessinée (voir l’historique ci-dessous), Pierre Lungheretti, directeur de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, avait été chargé de mener une mission de réflexion sur la politique nationale en faveur de la bande dessinée. Ce rapport vient notamment donner corps à la prise de conscience de la situation des auteurs de BD par les pouvoirs publics. Espérons qu’il permettra, enfin, de commencer à déployer des solutions concrètes. Dans le discours qui a suivi, le Ministre de la Culture a validé les premières recommandations du rapport et a défini sa politique pour la Bande Dessinée.

Le rapport Lungheretti

Épais de 115 pages (et 45 pages d’annexe), c’est un imposant travail qui compile et met en perspective de nombreuses données. Il est surtout le résultat d’entretiens avec plus de 200 personnes. Après un état des lieux, le rapport s’intéresse au marché de la BD, aux limites actuelles de sa reconnaissance institutionnelle et à la question du patrimoine.

Un long chapitre est en particulier consacré aux créateurs sous le titre : la situation précarisée des auteurs exige une mobilisation collective. Il relève bien les spécificités du travail des auteurs de BD, soulignant la fragilisation de leur situation et la baisse de leurs rémunérations. Il réfléchit à comment améliorer la confiance entre les auteurs et les éditeurs, mais aussi à comment permettre aux auteurs de mieux connaitre leurs droits. Il étudie les moyens de renforcer le rôle des collectivités territoriales.

Passionnant et clair sur la situation précaire des auteurs, il donne lieu à des recommandations fortes que SNAC et EGBD ne peuvent qu’approuver. Entre autres, pour le citer :

  • « Il est indispensable qu’une méthode de concertation interministérielle puisse être définie avec les instances représentatives d’auteurs. »
  • « Il est […] indispensable de s’interroger sur le périmètre des activités artistiques des auteurs qui doivent donner lieu à des revenus artistiques sous la forme de droits d’auteur. »
  • « Il serait souhaitable que le CNL puisse inclure dans le conditionnement de ses aides aux festivals et manifestations littéraires la rémunération de la présence d’auteurs. »

Le rapport prend aussi acte des propositions de la Ligue des auteurs professionnels dont le SNAC et les EGBD sont cofondateurs au côté de la Charte des auteurs et des illustrateurs jeunesse :

« La réflexion en cours portée par la Ligue des Auteurs Professionnels […] mériterait de faire l’objet d’un débat approfondi et d’être intégrée à une réflexion globale sur le statut des artistes auteurs. Le projet de la Ligue des Auteurs Professionnels est d’apporter des éléments de propositions à cet égard, en insistant sur la prise en compte de la professionnalisation de l’activité des auteurs. »

Le rapport fait surtout 54 propositions précises, argumentées et chiffrées quand c’est possible. Le SNAC et les EGBD retiennent en particulier, même si toutes méritent d’être étudiées avec attention :

  • N°8 : Conditionner les aides publiques aux éditeurs à un code des usages auteurs/éditeurs.
  • N°9 : Instituer une méthode de concertation entre les différents ministères concernés par les réformes du régime social et les organismes représentatifs des auteurs.
  • N°10 : Envisager un nouveau régime des revenus accessoires permettant l’augmentation du volume autorisé compte tenu de la demande croissante d’interventions de médiations d’auteurs.
  • N°11 : Conditionner les aides publiques aux festivals à la rémunération des auteurs pour leur présence et à un équilibre hommes/femmes parmi les auteurs invités.
  • N°13 : Renforcer l’offre de formation continue des auteurs.
  • N°17 : Créer un programme d’aide centré sur l’émergence pour structurer des parcours d’auteurs et favoriser l’insertion des jeunes auteurs sortant des écoles.
  • N°23 : Élaborer un code des usages entre éditeurs, auteurs et libraires pour améliorer certaines pratiques dans le prolongement de l’accord de juin 2017 et pour équilibrer le rythme de parution des nouveautés tout au long de l’année.
  • N°52 : Fiabiliser le marché des planches originales.
  • N°53 : Renforcer l’information juridique et fiscale auprès des ayants droit d’auteurs pour favoriser les dons et les dations de fonds d’auteurs.

Auteurs, lisez ce rapport, il vous permettra de découvrir l’ampleur des enjeux qui vous concernent.

 

Franck Riester, Ministre de la Culture, Pierre Lungheretti, directeur général de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image d’Angoulême, et Denis Bajram, vice-président de la Ligue des auteurs professionnels, coordinateur général des États Généraux de la Bande Dessinée et pilote au SNAC BD.

Franck Riester, Ministre de la Culture, Pierre Lungheretti, directeur général de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image d’Angoulême, et Denis Bajram, vice-président de la Ligue des auteurs professionnels, coordinateur général des États Généraux de la Bande Dessinée et pilote au SNAC BD.

Le discours de Franck Riester, Ministre de la Culture

Lors du discours qui a suivi la remise du rapport, Franck Riester, Ministre de la Culture, a confirmé son intention d’avancer vite. 2020 sera donc l’année de la bande dessinée. « Ce sera l’occasion de multiplier les expositions, les colloques et les commandes publiques, sur tout le territoire et à l’étranger ; de donner à la BD reconnaissance et visibilité, durant toute une année. L’organisation de cet évènement sera confiée au Centre national du Livre, en collaboration avec la Cité internationale »

Il a surtout conclu son discours par une longue intervention au sujet des auteurs. « Je suis également venu vous parler d’une question que je ne peux ignorer. Qu’aucun de nous ne peut ignorer. Celle de l’avenir des auteurs de bande dessinée. » Évoquant la réussite économique de la Bande Dessinée, il conclue « Cependant, ne nous y trompons pas : derrière ces chiffres, se cachent aussi beaucoup d’interrogations des auteurs, sur leur métier, leur quotidien, leur précarité. J’en suis pleinement conscient. J’ai entendu leurs préoccupations lors de nos échanges, et par la voix des États généraux de la Bande Dessinée. »

Il a précisé que l’État tirerait les conclusions des études, dont la dernière en cours sur la littérature jeunesse : « Les solutions relèvent principalement de la responsabilité de la chaîne du livre. Néanmoins, si l’État doit jouer son rôle de médiateur, il le fera – comme il l’a fait, par le passé. »

Puis il est revenu sur les réflexions en cours sur la réforme du régime social des artistes-auteurs. Il a affirmé qu’ « elles feront l’objet d’une concertation effective » et qu’il souhaitait que les services de l’État puissent travailler avec les auteurs sur ce dossier. « Un groupe de travail sera installé à cet effet prochainement. »

Enfin, il a répondu à la demande que lui avait fait la Ligue des auteurs professionnels lors qu’elle avait été reçue au Ministère : « J’ai par ailleurs décidé d’engager une réflexion plus large sur le statut du créateur, afin de redéfinir sa place économique, sociale et culturelle », précisant qu’elle aurait lieu dès cette année. « Les artistes-auteurs et l’ensemble des acteurs culturels y seront pleinement associés. »

Le temps est toujours trop long entre la montée d’un malaise social et les solutions qui lui sont apportées. Après cinq années de mobilisation et de travail, Le SNAC-BD et les EGBD veulent croire que les pouvoirs publics mettront en œuvre le plus possible des propositions du rapport Lungheretti. Ils espèrent aussi que tous les acteurs du milieu de la Bande Dessinée comprendront enfin, à sa lecture, les enjeux et les risques pour l’avenir du 9e Art.

 

Le SNAC-BD et les EGBD remercie le Ministre de la Culture, Frank Riester, d’avoir pris en main rapidement et volontairement ce sujet. Ils attendent de lui qu’il fasse tout pour que d’ici 2020, année de la Bande Dessinée, les pouvoirs publics suivent le chemin tracé par le rapport.

Le SNAC-BD et les EGBD tiennent enfin à remercier Pierre Lungheretti pour son implication et sa disponibilité comme pour la qualité et l’ambition de ce rapport.

 

Rappel historique

Cela fait déjà cinq ans que les auteurs de Bande Dessinée sont mobilisés au sujet de leur condition sociale et économique. En 2014, la retraite complémentaire des artistes-auteurs, le RAAP, annonçait une très forte augmentation des cotisations. Ce sont les créateurs de bande dessinée qui, avec leur syndicat, le SNAC BD, ont signifié les premiers leur opposition à une réforme incompatible avec leurs revenus souvent déjà trop faibles. Lors du festival d’Angoulême 2015, la première manifestation de l’histoire de la BD rassemblait 500 auteurs dans la ville.

Ce mouvement social fut accompagné par la création des États Généraux de la Bande Dessinée, qui avait pour but d’étudier la situation, en commençant par celles des auteurs, et d’essayer de créer un lieu de concertation de tout le milieu de la BD. L’enquête statistique des EGBD réalisée durant le dernier trimestre de 2015 et dévoilée lors du festival d’Angoulême 2016 allait montrer que la situation des auteurs était encore plus alarmante que prévue : 53% des 1500 répondants avaient un revenu inférieur au SMIC annuel brut, 36% étaient déjà sous le seuil de pauvreté, chiffre se montant à 50% pour les femmes. L’évolution des revenus sur trois années montrait une tendance à la baisse de 2% par an.

La Cité de la Bande Dessinée et de l’Image d’Angoulême apporta son appui aux auteurs en portant cette question lors de la première édition des Rencontres nationales de la bande dessinée en septembre 2016 et en signant avec les EGBD une convention trisannuelle. Grâce à tout un travail de pédagogie, à de nombreuses rencontres et à la mobilisation sans faille du SNAC BD, la presse offrit enfin un large écho à la situation des auteurs lors du festival 2017 qui participa à ce que Françoise Nyssen, Ministre de la Culture demande à Pierre Lungheretti, directeur de la Cité, de mener une mission de réflexion sur la politique nationale en faveur de la bande dessinée.

 

Publication du constat de la Ligue des auteurs professionnels

Les auteurs de livres ne possèdent pas vraiment de statut professionnel. Pourtant leur travail alimente une filière de plus de 80 000 personnes, des éditeurs aux libraires.

Ils sont les créateurs, ceux sans qui rien n’existerait, et pourtant ils restent la variable d’ajustement : la moitié d’entre eux vit avec moins que le smic.

Leur situation ne cesse de se dégrader. Les gouvernements successifs, sans y prendre garde, malmènent les auteurs, les placent dans des cases inadaptées, augmentent leurs cotisations au moment où leurs revenus baissent.

La propriété intellectuelle est un enjeu majeur du XXIème siècle et la France ignore ses auteurs. Le déclin de la création littéraire aura des répercussions sur l’ensemble du secteur culturel : c’est aussi un choix de civilisation.

Un constat détaillé, précis, de la situation a été dressé par la Ligue des auteurs professionnels. Il est dès maintenant disponible en ligne et en téléchargement.

Le communiqué de presse de la Ligue :

La Ligue des auteurs professionnels

Ce 6 septembre 2018, à la Maison de Balzac à Paris, se sont rassemblés auteurs et organisations d’auteurs pour fonder la Ligue des auteurs professionnels. Les États Généraux de la Bande Dessinée avaient pris acte cette année des limites de la démarche entreprise depuis 2014 et s’étaient investis dans les États Généraux du Livre.

Aujourd’hui ils sont, avec la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse et les auteurs fondateurs, à l’initiative de cette nouvelle étape dans la défense des auteurs. La première mission que s’est assignée la Ligue, au moment où les pouvoirs publics réforment le statut social et fiscal des auteurs, est de travailler sérieusement à améliorer ce statut, qui est actuellement aussi fragile et que partiel.

Vous pourrez d’ores et déjà l’activité de la Ligue des auteurs professionnels sur son site ligue.auteurs.pro.

 

L’heure du bilan et des réorientations

 

États Généraux du Livre, #auteursencolere et #payetonauteur

L’heure du bilan et des réorientations
pour les États Généraux de la Bande Dessinée

Au sortir des premier États Généraux du Livre, nous, fondateurs des États Généraux de la Bande Dessinée, nous sommes dits qu’il était temps d’expliquer où nous en étions et pourquoi nous nous investissons dans ces nouveaux États Généraux du Livre mais aussi dans les mobilisations sur les réseaux sociaux.

La « chaîne du livre » est la métaphore par laquelle on décrit l’imbrication des multiples maillons qui permettent de faire passer la création d’un auteur jusqu’au lecteur : éditeur, diffuseur, distributeur, libraire et tous les multiples intervenants et métiers du livre. Cette chaîne n’a de sens que si elle parvient à remplir son rôle : relier l’auteur et le lecteur. Pourtant, aujourd’hui, alors que le premier maillon, l’auteur, appelle au secours, il se sent bien seul. Le dernier maillon, le lecteur, est toujours choqué quand il découvre que toute la chaîne réussit à vivre de l’économie du livre sauf, bien trop souvent, le premier maillon.

Lorsque nous avons créé les États Généraux de la Bande Dessinée, c’était dans l’idée qu’il était impossible que les autres maillons de la chaîne du livre soient indifférents à la précarisation du premier. C’est pour cela que nous avons proposé un partenariat à tous les syndicats et organisations qui les représentent. Nous avons lancé en premier une enquête sociologique et économique sur les auteurs, avec l’idée d’agir ensuite de la même manière avec tous les autres maillons, car, dans une chaîne, tout est lié.

La situation des auteurs s’est révélée pire que nous l’avions imaginée. L’enquête a montré qu’en 2014, 53% des auteurs de BD professionnels avaient un revenu inférieur au SMIC annuel brut, 36% étaient même en-dessous du seuil de pauvreté. Si l’on ne prend en compte que les femmes, 67% étaient déjà sous le SMIC annuel brut et 50% sous le seuil de pauvreté. Avec une tendance à la baisse de ces revenus sur trois ans qui laissait à penser que tous les ans, 2% d’auteurs supplémentaires allaient descendre sous ces seuils… Ces chiffres ont fait beaucoup de bruit, et ont été relayés de la presse jusqu’au Parlement.

Quelles réactions ? Les pouvoirs publics ont montré immédiatement leur inquiétude et nous avons eu de nombreux rendez-vous avec les différents ministres et leurs services. Hélas, les EGBD ont connu 4 ministres de la Culture en 4 ans : chaque changement de gouvernement nous a fait redémarrer ce travail presque à zéro. Le seul soutien public concret nous a été apporté par une subvention de 1500 euros de la région Rhône-Alpes-Auvergne.Plusieurs festivals ont été dès le début d’un soutien précieux, à commencer par le festival d’Angoulême qui nous a permis de présenter notre session inaugurale dans d’excellentes conditions. La Cité internationale de la bande dessinée et de l’image a été aussi un partenaire solide dès le début, ce qui s’est conclu en 2017 par la signature d’une convention triennale et notre implication dans les Rencontres nationales de la Bande Dessinée.

Les sociétés d’auteurs, en partenariat depuis le début, ne se sont pas toutes montrées très attentives, mais semblent tout de même avoir tiré des conséquences de nos travaux. Nous remercions tout particulièrement la SCAM dont la subvention de 5 000 euros nous a permis de mener l’étude sur les auteurs. Nous avons donc mené tout notre travail sur 4 ans avec seulement 6 500 euros de subventions. Il aurait de toute façon été odieux de dépenser des fortunes pour dire que les auteurs manquaient d’argent.

Côté éditeurs, le SEA, Syndicat des éditeurs alternatifs, qui représente des petits acteurs économiques, a eu un contact suivi avec nous. En proposant en 2017 un contrat type beaucoup plus favorable aux auteurs, il a montré qu’il n’ignorait pas leur situation.

Qu’en a-t-il été du SNE, Syndicat National des Éditeurs, que nous avions invité dès le premier jour à nous accompagner ? Il faut bien admettre qu’à part faire acte de présence à nos sessions, il ne s’est pas du tout engagé. Le SNE ne s’est jamais positionné publiquement sur notre enquête, comme si la précarité des auteurs ne le concernait pas, et comme si cette précarité n’était pas la conséquence, en partie, des pratiques des principaux éditeurs. Certains éditeurs nous ont même vertement signifié que ce que nous faisions était mauvais pour la bande dessinée : nous étions en train de casser la machine à rêves. Il est plus facile d’accuser le porteur de mauvaises nouvelles que d’assumer sa part de responsabilité.

Même si de nombreux libraires se sont émus publiquement des résultats de l’enquête auteurs, leur syndicat a brillé lui aussi par son silence.

Enfin, alors que la presse généraliste s’est bien fait dans l’ensemble le relais de nos travaux, force est d’avouer que la presse spécialisée BD ne s’est pas sentie très concernée. Des esprits chagrins pourraient penser qu’elle s’est alignée sur la position des grands éditeurs qui la financent par la publicité. Nous craignons surtout qu’elle aussi préfère vendre du rêve plutôt que de la misère.

Finalement, il faut bien l’admettre : notre idée de réunir toute la chaîne du livre autour de la table pour réfléchir ensemble à nos problèmes a conduit à un échec. Cette chaîne n’est pas une chaîne de solidarité. C’est une chaîne où chacun des maillons veut tirer la chaîne à lui. Et où l’auteur, pour de multiples raisons, est devenu le maillon faible. Le plus étonnant est de voir tout le monde continuer son petit commerce comme si de rien n’était depuis les résultats de l’étude auteurs. Comme si une chaîne qui commence par un maillon très affaibli ne risquait pas de lâcher du jour au lendemain, entraînant tous les autres maillons dans l’abîme. Comme si ça n’était pas déjà arrivé pour d’autres arts ou pour d’autres pays.

C’est face à ce constat d’échec que nous avons abandonné l’idée de mener les études sur les autres maillons de la chaîne du livre. Nous allions passer déjà trop d’heures à nous battre ne serait-ce que pour obtenir une participation réelle et sincère à ces études. Les 1 500 auteurs qui avaient répondu à l’enquête qui les concernait l’avaient fait en toute transparence, mais nous avons vite compris au fil de nos discussion que tous les autres maillons n’avaient pas très envie qu’on regarde de trop près les flux financiers ou la situation de leurs employés…

C’est face à ce constat que nous avons finalement dû accepter de n’être que les porte-paroles des difficultés socio-économiques des auteurs, et non les médiateurs que nous avions proposé d’être. L’étude auteurs des EGBD a eu un impact énorme sur la profession, mais nous avions sans doute surestimé nos capacités comme la solidarité dans la chaîne du livre.

C’est aussi face à ce constat que nous avons rejoint l’organisation des États Généraux du Livre dès le début. Déjà parce qu’une bonne partie des problèmes de auteurs de Bande Dessinée sont les mêmes que ceux de tous les auteurs du livre.

Nous avons aussi rejoint ces États Généraux du Livre tout simplement parce que ce sont les EGBD qui ont servi de modèle aux autres organisations d’auteurs pour monter ces « super » états généraux. Elles avaient toutes envie de faire entendre aussi fortement leurs problèmes. Nous avons apporté notre expertise sociologique, institutionnelle et en communication. Nous avons aussi apporté notre expérience, et l’ensemble des désillusions qui allaient avec.

Ensemble, et forts de l’expérience de toutes les organisations qui ont été à l’initiative de ces États Généraux du Livre, nous avons dû admettre que le temps de la diplomatie courtoise était révolu. L’indifférence des pouvoirs publics, comme d’une bonne partie de la chaîne du livre, aux problèmes des auteurs nous oblige à hausser le ton.

Cela ne changera rien à notre détermination. Les fondateurs des EGBD sont plus actifs et vigilants que jamais. Mais cette fois, au lieu de tenter de mettre en place une collaboration verticale dans la chaîne de la BD, nous avons décidé aussi de faire un front horizontal avec tous les auteurs du livre. Ensemble, nous les modérés, nous les diplomates, nous avons fini par prendre comme signe de ralliement un hashtag qui dit tout de ce changement : #auteursencolere

Il faut dire que le ton s’était déjà durci sur les réseaux sociaux avec #payetonauteur, né spontanément en découvrant que le salon Livre Paris ne payait pas tous les auteurs en intervention. Qu’un salon organisé par le SNE n’adopte pas la règle commune qu’essaye de mettre en place le CNL (Centre National du Livre) sur le modèle des tarifs de La Charte a été considéré comme un vrai mépris des éditeurs pour les auteurs. Une erreur heureusement réparée après une campagne impressionnante. Après un round contre la même absence de paiement des auteurs par l’UNESCO lors de sa Journée du livre et du droit d’auteur, #payetonauteur s’est à nouveau embrasé en apprenant la tenue de malheureux « États Généraux » bis voulus par l’État la veille de ceux organisés par les auteurs (en fait consacrés surtout à la francophonie et depuis théoriquement renommés « assises »).

La première session des États Généraux du Livre s’est donc tenue à la Maison de la Poésie ce mardi 22 mai 2018. Elle a été courtoise, malgré le dédain et les maladresses des pouvoirs publics sur les volets sociaux et fiscaux. La salle a été souvent atterrée en découvrant l’ampleur de la catastrophe en cours. L’amateurisme des autorités de tutelle et l’absence de concertation ont conduit à une situation désastreuse, 7 mois avant des changements majeurs dans la « protection » sociale et le régime fiscal des auteurs. Beaucoup de promesses de concertation ont été faites par les pouvoirs publics sous la pression de ces États Généraux. Espérons qu’elles seront suivies de faits et d’effets.

La seconde session des États Généraux du Livre sera consacrée en 2019 au partage de la valeur. La situation économique des auteurs se sera sans doute encore dégradée d’ici là. La colère sera probablement encore montée de quelques crans. La mobilisation de #payetonauteur et #auteursencolere aussi. Nous sommes à la croisée des chemins. Il est urgent que toute la chaîne du livre comprenne enfin que les problèmes des auteurs sont ses problèmes.

Benoît Peeters, président,
Denis Bajram, secrétaire
Valérie Mangin, trésorière

Actes des deuxièmes Rencontres nationales de la bande dessinée

Après une première édition qui prolongeait les travaux des États Généraux de la Bande Dessinée consacrés aux auteurs, le thème des deuxièmes Rencontres nationales de la bande dessinée était éducation et bande dessinée. Organisées les 5 et 6 octobre 2017 par la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image d’Angoulême, les rencontres ont accueilli des invités de premier ordre, dont les ministres de la Culture et de l’Éducation nationale. En présence de nombreux auteurs, enseignants, chercheurs, étudiants et médiateurs culturels, de riches conférences ont alterné avec des tables rondes et des débats.

La Cité vient de publier les actes de ces journées. Au sommaire :

  • Rencontres des savoirs
    Samuel Cazenave
  • Avant-propos
    Pierre Lungheretti
  • Allocution de la Ministre de la Culture
    Françoise Nyssen
  • Allocution du Ministre de l’Éducation nationale
    Jean-michel Blanquer
  • L’artification de la bande dessinée
    Nathalie Heinich
  • La bande dessinée à l’école hier et aujourd’hui
    Sylvain Aquatias
  • Perspectives de formation à la didactique de la bande dessinée en classe de littérature
    Nicolas Rouvière
  • Bande dessinée et diffusion des savoirs : l’avènement du documentaire graphique
    Hélène Raux
  • La bande dessinée et le haut conseil de l’éducation artistique et culturelle
    Anne Bisagni Faure

Les EGBD recommandent particulièrement aux auteurs de bande dessinée la lecture de l’intervention de Nathalie Heinich, qui éclaire de manière très intéressante la question de la l’artification de la bande dessinée.

Ces actes sont librement téléchargeables en ligne :

Les États Généraux du Livre

Les nuages s’accumulent sur l’avenir des auteurs. Plusieurs réformes prévues ou en cours sont très inquiétantes : CSG, AGESSA, impôt à la source… C’est pourquoi leurs associations et syndicats lancent cette année des États Généraux du Livre :

Les États Généraux de la Bande Dessinée sont heureux que leur initiative pour la BD ait pu nourrir l’ensemble des organisations d’auteurs du livre. Nous avons été consultés par le CPE, l’association qui les regroupe toutes, et nous avons participé à la définition de ces États Généraux du Livre. Nous avons rappelé l’importance de ne pas dégrader encore la situation des auteurs et de mettre en place rapidement des solutions pour combattre leur précarité grandissante.

IIe Rencontres Nationales : Éducation et Bande Dessinée

Sous le titre Éducation et Bande Dessinée, la Cité internationale de la Bande Dessinée et de l’Image organise jeudi 5 et vendredi 6 octobre 2017 la deuxième édition de ses Rencontres Nationales de la Bande Dessinée.

Réunissant différents acteurs du secteur invités à débattre des problématiques professionnelles en cours, les rencontres visent à proposer un espace de débat et d’analyse pour l’ensemble de la profession, avec des éclairages issus des réflexions d’acteurs de la chaîne éditoriale ainsi que de grands témoins, permettant de restituer les enjeux de la bande dessinée dans un contexte plus large.

« Véritable observatoire du neuvième art, la Cité a choisi de s’intéresser aux relations qui relient l’enseignement et la bande dessinée. Officiellement étudiée en classe depuis la mise en œuvre de l’Histoire des Arts revalorisant les arts visuels (2008-2009), la bande dessinée semble avoir conquis des milieux qui lui ont longtemps résisté, à savoir, les programmes des premiers cycles d’enseignement, voire les études universitaires.

On ne compte plus les cas d’utilisation de la bande dessinée comme support d’enseignement. Ici et là naissent des initiatives telles que les classes BD, les séminaires pour les enseignants, les résidences d’auteurs en milieu scolaire, les projets de recherches pluridisciplinaires ayant en commun la bande dessinée…

S’adaptant à ce qui peut s’apparenter à un mouvement de fond, les éditeurs spécialisés se sont aussi emparés du thème, multipliant les collections à visée « pédagogique » (La Petite Bédéthèque des Savoirs, Sociorama, Cases d’histoires…).

Spécialiste du domaine, Nicolas Rouvière s’interrogeait récemment sur cette intégration de la bande dessinée en classe. Notre chercheur la jugeait « en trompe-l’œil », pointant, notamment, l’utilisation de la bande dessinée pour enseigner autre chose qu’elle-même, soulignant le manque de formation des enseignants et l’absence, encore aujourd’hui, d’un vrai consensus des parents d’élèves et du monde éducatif en faveur du neuvième art.

Le moment est donc venu de faire le point sur les relations entre éducation et bande dessinée ; d’envisager tous les aspects d’une vraie réflexion sur les pistes pédagogiques et didactiques que tracent l’enseignement et la pratique du neuvième art, ainsi que les méthodologies à appliquer en classe et sur les temps périscolaires. »

Ces rencontres bénéficient du partenariat du réseau Canopé du Ministère de la Culture et de la Communication, du Ministère de l’Éducation Nationale, des États Généraux de la Bande Dessinée, de GrandAngoulême, du Pôle Image Magelis et de la région Nouvelle-Aquitaine.

Renseignements, programme et inscriptions sur www.citebd.org